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No35
   10-décembre-2002   

Nos engagements:

Faire un renvoi sur votre blog QUE PENSER DE L'ETAT ACTUEL DU PROJET DE FUTUR REGLEMENT INTERIEUR DE COCA-COLA ENTREPRISE ?

Le règlement intérieur peut-il s'appliquer aux salariés extérieurs à l'entreprise travaillant dans l'entreprise?

Les salariés extérieurs ne sont concernés que par les dispositions concernant l'hygiène, la sécurité et la discipline générale et non par l'ensemble du Règlement intérieur.

La violation du règlement intérieur est-elle "une faute"?

Le règlement intérieur de CCBSA, respectueux de la loi et des salariés, disait dans son Article 11 que l'atteinte aux règles était un "agissement fautif" et qu'il pouvait motiver une "sanction éventuelle". Le projet met les pieds dans le plat qu'il présente aux salariés. La violation du règlement intérieur "constitue une faute". "Le refus de respecter une consigne de sécurité constitue une faute". Quand le projet aborde le chapitre des Sanctions, il revient à l'"agissement fautif", mais c'est qu'il recopie alors le Règlement intérieur actuel.

L'infraction à une règle donne-t-elle obligatoirement lieu à une sanction?

Si l'on en croit le projet, "les infractions aux obligations relatives à l'hygiène donneront lieu à l'application de l'une des sanctions prévues au présent règlement". Si un employeur se conformait à cette règle, il n'aurait plus besoin de convoquer un salarié à un entretien préalable pour écouter ses explications et une simple lettre directe de sanction serait le seul dialogue de l'employeur.
En matière de harcèlement, on n'écoute pas non plus le présumé fautif: "tout manquement aux règles relatives à la discipline donnera lieu à l'une des sanctions prévues par le présent règlement".
Le salarié qui refuse ou s'abstient d'utiliser un équipement de sécurité "encourt l'une des sanctions disciplinaires prévues par le présent règlement intérieur". Ici aussi, on ne risque pas d'encourir, on encourt directement.
Tout retard, non motivé par des circonstances particulières est encore plus problématique puisqu'il "constitue une faute passible de sanctions".
Par contre, le refus de se soumettre aux visites médicales "peut entraîner l'une des sanctions prévues au présent règlement". L'absence irrégulière aussi, outre la non-rémunération "peut, de plus, entraîner une sanction disciplinaire telle que prévue par le présent règlement".
Il est aussi précisé que pour la non-production de certificats médicaux ou le travail rémunéré pendant une absence pour maladie ou accident "des sanctions disciplinaires peuvent également être prises contre le salarié concerné".
Quand on passe au chapitre des Sanctions, après avoir parlé d'"agissement fautif", comme le Règlement intérieur actuel, on en revient à des sanctions obligatoires, bien que le titre parle d'une "échelle des sanctions éventuelles" puisqu'il est dit "selon la nature et les circonstances des agissements, ou de l'acte, la sanction susceptible d'être appliquée par la hiérarchie au salarié sera l'une des sanctions suivantes". Le premier problème est que si l'on écrit le futur "sera" au lieu du conditionnel "serait", la sanction n'est plus éventuelle. Quand on se sera conformé au Code grammatical, il faudra quand même se conformer au Code du travail. La hiérarchie n'a pas de pouvoir disciplinaire, même si, chez Coca-Cola Entreprise, elle n'hésite pas très souvent à se substituer à l'employeur en envoyant des lettres de convocation à entretien préalable. Rappelons à l'employeur qu'il a lui seul le pouvoir disciplinaire et que le shérif ne peut pas aussi être juge. Si le règlement intérieur met fin au rôle du Directeur, où va-t-on? Le Règlement intérieur actuel est plus respectueux du Directeur puisqu'il précise que "la direction pourra appliquer l'une quelconque des sanctions suivantes". Et plus respectueux des salariés.

Le règlement intérieur peut-il renvoyer à des "instructions", "consignes", "prescriptions" et "notes de service" ayant la même autorité que le règlement même?

Non évidemment et les tentations de faire un règlement intérieur bis après promulgation d'un nouveau règlement intérieur ne serait pas légale, sinon il suffirait d'uns seule phrase pour faire un règlement intérieur: "Le présent règlement intérieur est constitué de notes de services qui seront portées ultérieurement à la connaissance des salariés!".
La seule possibilité légale est celle qui figure dans le projet et qui précise que "toute autre prescription générale et permanente relevant de ces domaines sera considérée comme une adjonction au présent règlement intérieur, dont l'entrée en vigueur sera soumise aux mêmes règles". Et à condition de ne pas chercher à faire des règlements intérieurs d'établissements après avoir fait un règlement intérieur d'entreprise sous peine d'illégalité.
La note de service par rapport à un règlement intérieur ne peut être qu'une simple modalité d'application et en aucun cas une règle nouvelle.
Par contre, le règlement intérieur lui-même, et pas des règlements séparés, peut prévoir des dispositions spéciales sur des catégories de personnes ou des secteurs d'établissements.
S'agissant de notes d'interdiction particulières, le Code du travail exige qu'elles soient rédigées en français, ce qui n'est toujours pas le cas en matière informatique.

Un salarié est-il tenu de "suivre les instructions qui lui sont données" par son supérieur hiérarchique ou tout autre échelon de la hiérarchie?

Le salarié est tenu d'exécuter les instructions de travail entrant dans l'intitulé de son poste défini dans son contrat de travail ou dans la définition des fonctions qui lui sont attachées (si elles ne sont pas en contradiction avec l'intitulé du poste). Par contre, le fait pour un salarié de refuser d'exécuter un travail n'entrant pas dans ses attributions, même s'il ne s'agit que d'un travail ponctuel de quelques minutes, ne constitue pas une faute, selon une Cassation sociale.

Un salarié a-t-il l'obligation légale de signaler à son supérieur hiérarchique ou à tout autre échelon de la hiérarchie "toute circonstance perturbant la bonne exécution du travail"?

Il n'y a pas obligation de délation dans les Codes français. Essaierait-on de nous faire repasser le "Code de bonne conduite en affaires" que l'intervention du Délégué syndical central FO de l'époque Georges Chapus avait réussi à faire annuler? Doit-on reprendre les mêmes démarches vis-à-vis du Ministère du Travail pour qu'il dénonce ces formulations? Si l'on examine le Règlement intérieur actuel, il enjoint à chaque salarié, à l'égard de ses supérieurs hiérarchiques, "de leur signaler toute circonstance perturbant la bonne exécution de son travail". Voilà une mesure raisonnable qui permet à chaque salarié d'améliorer son propre travail parce qu'il aura pu faire remonter un problème de sécurité, de qualité, de matériel, de formation ou de procédure qui gêne la bonne exécution de son contrat de travail. En supprimant "de son travail" et en lui substituant "du travail", on en arrive à une obligation de délation, ce qui a un tout autre sens.

Les termes "troubler l'ordre et la discipline" ont-ils leur place dans un règlement intérieur?

Dans le Règlement intérieur actuel, il est interdit de "causer du désordre", ce qui est une notion plus circonstancielle que "troubler l'ordre" qui est plus général. Le but d'un règlement intérieur est de fixer des règles et non des notions. De même, le but d'un règlement intérieur est de fixer des règles de discipline et non pas d'interdire l'indiscipline en général. Mettre cette phrase abstraite ne peut servir dans un règlement intérieur qu'à inquiéter inutilement les salariés.

Le règlement intérieur peut-il interdire des téléphones personnels sur certains postes après avis du CHSCT?

Oui, s'ils peuvent mettre en cause la sécurité de fonctionnement normal des postes, et non "du service" comme le dit le projet. Par contre; cela signifiera aussi que le supérieur hiérarchique devra lui aussi se tenir à cinq mètres du salarié concerné pour lui parler puisqu'il peut mettre en danger la sécurité du salarié sur son poste, à moins de déposer son propre téléphone portable professionnel au râtelier.

L'article sur les vols de bien appartenant à l'entreprise est-il correct?

La première chose bizarre est qu'on parle de "tout salarié victime d'un vol d'un bien appartenant à l'entreprise". La seule victime est l'entreprise et un salarié ne peut être victime que s'il est propriétaire.
La deuxième bizarrerie est l'obligation faite au salarié de porter plainte à la police ou la gendarmerie. C'est une obligation compréhensible pour un salarié se déplaçant à l'extérieur de l'entreprise avec du matériel appartenant à l'entreprise, mais dans l'entreprise même, pour les salariés travaillant avec des outils de l'entreprise qu'ils utilisent sur place, on ne comprend pas la mesure puisqu'elle équivaut à une autorisation de sortie pendant le temps de travail.
La troisième bizarrerie est que ce texte fait partie d'un chapitre Contrôles et qu'on supposerait qu'on parle des règles pour contrôler des voleurs éventuels. Mais on commence par évoquer une possibilité de "sanctionner les comportements négligents". Si l'employeur a mis des protections, il peut être logique de demander à la fin de la journée un rangement avec les protections, mais à partir du moment où il y a utilisation, c'est comme les célèbres piles, la meilleure façon de ne pas se faire voler le matériel utilisé, c'est de ne pas s'en servir, et là cela irait à l'encontre du travail lui-même. Il est souhaitable de ne pas demander au salarié tout et son contraire.

Le blâme peut-il être classé dans les "sanctions mineures"?

Le blâme simple, oui, mais le blâme avec inscription au dossier constitue une sanction susceptible d'avoir une influence sur la carrière du salarié et ne peut donc pas être qualifié de sanction mineure, selon une Cassation sociale.

Le règlement intérieur peut-il instituer une procédure pour sanction mineure qui se passe avec convocation écrite en lettre simple et sans droit à assistance d'une personne au choix du salarié faisant partie du personnel de l'entreprise?

L'employeur peut décider d'une procédure pour sanction mineure puisqu'il lui suffit d'indiquer qu'il envisage une sanction éventuelle (et non une sanction éventuelle pouvant aller jusqu'au licenciement). En revanche, tout entretien préalable doit se dérouler après lettre recommandée ou remise en main propre et avec droit notifié de pouvoir se faire assister d'un salarié de l'entreprise.

L'employeur doit-il remettre un exemplaire du règlement intérieur aux salariés "en particulier lors de l'embauche"?

Seul l'affichage est autorisé. La remise à tout salarié au moment de l'embauche a été rejetée par le législateur.

Le projet de nouveau règlement intérieur pourra-t-il annuler et remplacer "celui précédemment établi le 15 novembre 1990"?

Si le projet est quelque peu modifié, il pourra prétendre annuler et remplacer, mais plutôt le Règlement intérieur de CCB SA établi le 15 octobre 1990. Le 15 novembre 1990 doit normalement être la date d'entrée en vigueur.

Sur l'utilisation des ressources informatiques, la charte NTIC garde un esprit libéral et nous y reviendrons dans un prochain article.


   top.gif    Dépôt CCE: 10-décembre-2002   
   c.gif    Responsable de publication: André PUJOL